Mitra Hejazipour, championne d’échecs : « J’ai porté le voile à l’âge de 5 ans, au fil des années je n’en pouvais plus »

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Mitra Hejazipour, surdouée des échecs, s’est réfugiée en France après s’être spectaculairement opposée au régime iranien. S’est ensuivie une difficile période d’adaptation, loin des siens. Elle a enfin été naturalisée française et repart à la conquête de sa place au sommet des championnats d’échecs. A partir du 18 avril, elle concourra pour le championnat d’Europe à Rhodes (Grèce).

Je ne serais pas arrivée là si…

… Si je n’avais pas décidé d’enlever mon voile lors du championnat du monde d’échecs de blitz (des parties très rapides) à Moscou, le 25 décembre 2019. Je représentais l’équipe nationale d’Iran. Cet acte, qui a fait le tour du monde sur les réseaux sociaux et dans les médias, a changé ma vie. J’ai été exclue de mon équipe dès le 2 janvier 2020 et j’ai compris que je ne pourrais plus retourner dans mon pays.

C’était pourtant une décision longuement mûrie…

Je réfléchissais depuis des années à faire quelque chose. Depuis l’âge de 9 ans, grâce aux échecs, j’ai beaucoup voyagé à l’étranger et je voyais bien que les choses ne se passaient pas de la même façon que chez nous. Je me suis rendue dans une trentaine de pays, ce n’était pas pour visiter, juste pour jouer. Néanmoins, j’ai pu observer très tôt des différences culturelles et les libertés dont bénéficiaient les autres en regardant comment les femmes s’habillaient, se promenaient dans la rue.

Lire aussi (2021) : Article réservé à nos abonnés Pour la championne iranienne Mitra Hejazipour, la liberté au bout de l’échiquier

Sur le plan politique, plus je grandissais, plus certaines choses me choquaient. Dès qu’une opposition émergeait en Iran, elle était immédiatement brimée, les opposants étaient arrêtés ou tués. Des milliers de gens ont été exécutés, je le savais par des discussions avec des amis qui avaient perdu des membres de leur famille ou qui avaient disparu après s’être opposés au régime. J’avais également des informations par les réseaux sociaux, malgré la censure.

Quel a été le déclic de votre rébellion ?

Ma grande source d’inspiration a été cette femme qui, en décembre 2017, a enlevé son voile, est montée sur un coffret électrique en plein Téhéran et s’est fait photographier tête nue avec son voile au bout d’une perche qu’elle brandissait en guise de contestation. Ce geste a été répété par d’autres et cette contestation a provoqué une vague d’arrestations.

J’ai commencé à réfléchir à faire moi aussi quelque chose pour marquer les esprits et attirer l’attention sur la condition des femmes de mon pays. A ce moment-là, on ne parlait plus du mouvement des femmes iraniennes, qui a pourtant démarré lors de la révolution, en 1979, avec de longues périodes de pause. La pression du régime était si forte que la parole était muselée. Les championnats du monde d’échecs attirent beaucoup de médias, ça m’a semblé être le moment idéal.

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