Israël-Hamas : les dangers de la polarisation politique française

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L’un des enjeux, et non des moindres, du déplacement d’Emmanuel Macron au Proche-Orient est lié à la situation intérieure française. Sur fond de menace terroriste, le conflit entre Israël et le Hamas est susceptible de déchirer le fragile tissu national en raison du poids que représentent en France les communautés juive et arabo-musulmane, les plus importantes d’Europe. A ce stade, les tensions restent contenues, mais l’augmentation du nombre des actes antisémites – 501 actes recensés par le ministère de l’intérieur entre le 7 et le 22 octobre – constitue une alerte. L’autre signal d’alarme vient de la violence du débat politique, qui préjuge le pire si, en dépit de toutes les mises en garde, Israël décidait de lancer une offensive terrestre d’envergure à Gaza.

A chaque embrasement dans la région, le sujet a profondément clivé en France, créant souvent des fêlures à l’intérieur d’un même parti. Cette fois, c’est la polarisation aux extrêmes qui domine, d’autant plus dangereuse qu’elle n’est pas dénuée de calculs politiques. En refusant de qualifier le Hamas d’organisation terroriste, Jean-Luc Mélenchon a fait le pari cynique d’être le mieux placé pour récupérer la colère dans les banlieues, si un jour elle explose. Si Marine Le Pen se présente désormais comme la meilleure alliée d’Israël, c’est pour mieux blanchir son parti de son passé antisémite. Le RN, qui défendait jusqu’à présent la création d’un Etat palestinien en paix avec Israël, y voit désormais, selon les termes de son président, Jordan Bardella, « une couveuse au terrorisme islamiste ».

L’Assemblée nationale est le reflet de cette polarisation. Alors qu’à peine une centaine de députés ont participé au débat sur la situation au Proche-Orient, lundi 23 octobre, l’Hémicycle a été d’emblée électrisé par l’attaque portée par Jean-Luc Mélenchon contre Yaël Braun-Pivet. La présidente de l’Assemblée nationale avait manifesté un soutien sans nuance à Israël. Elle s’est vue accusée en retour de « camper à Tel-Aviv pour encourager le massacre » à Gaza. Le président (MoDem) de la commission des affaires étrangères, Jean-Louis Bourlanges, qui tentait de défendre une position équilibrée s’est vu reprocher de tenir « un discours munichois » par le député Les Républicains Meyer Habib, proche de Benyamin Nétanyahou.

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Malaise dissipé

Dans ce contexte incendiaire, il était urgent pour le président de la République de dissiper les malentendus susceptibles de servir de carburant à l’un ou l’autre camp. De son déplacement de deux jours en Israël, en Jordanie et en Egypte, on retiendra que le soutien et la solidarité envers Israël, pleinement réaffirmés, n’en sont pas pour autant inconditionnels. Depuis Le Caire, Emmanuel Macron a qualifié d’« erreur » une éventuelle offensive terrestre « massive » dans la bande de Gaza. On retiendra aussi le souci de la France de ne pas confondre le Hamas et la Palestine, de rappeler le droit légitime des Palestiniens à disposer d’un territoire et d’un Etat et de participer aux opérations humanitaires à Gaza.

Parce que le premier réflexe du gouvernement français avait été d’interdire les manifestations propalestiniennes, le sentiment avait pu prévaloir que la position française était devenue univoque. Le malaise est aujourd’hui heureusement dissipé. Le président de la République n’en a pas pour autant marqué de points auprès de ses opposants. Tous ont tourné en dérision sa proposition de « coalition régionale et internationale » pour « lutter » contre le Hamas. Mal ficelée, son annonce est apparue comme la surprise de trop.

Le Monde

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