Sur une vidéo tournée dans l’hôpital Al-Shifa, à Gaza, un homme est allongé sur un brancard posé à même le sol, un autre blessé est assis contre le mur d’un couloir bruyant et des soignants s’agitent tout autour d’eux. L’établissement de santé, le plus important de la bande de Gaza, tourne à 150 % de sa capacité. Mercredi 25 octobre en début de soirée, d’autres images diffusées sur les réseaux sociaux montraient sa façade, plongée dans le noir. Dans vingt-quatre à quarante-huit heures, la plupart des hôpitaux de l’enclave palestinienne n’auront plus d’électricité, faute de carburant pour faire fonctionner leurs générateurs. Les patients en soins intensifs, ceux qui ont besoin de dialyse et les cent trente bébés actuellement sous incubateur à Gaza se retrouveront condamnés à une mort quasi certaine.
Israël impose un état de siège presque total à la bande de Gaza en représailles à l’attaque du Hamas sur son territoire, le 7 octobre, qui a fait 1 400 morts. L’armée israélienne bombarde en continu, depuis dix-neuf jours, l’enclave palestinienne administrée par le mouvement islamiste. Plus de 6 500 Gazaouis ont été tués et plus de 17 000 autres blessés selon le dernier bilan du ministère de la santé local. Lors de la seule journée de mardi, 700 Palestiniens ont été tués selon cette même source, un record absolu.
Le système de santé gazaoui, déjà gravement affaibli par le blocus israélien qui dure depuis plus de seize ans, « s’est effondré », a déclaré mercredi le ministère, qui décrit des hôpitaux incapables de faire face à l’afflux continu de blessés, dont une bonne partie présentent des blessures graves, complexes à opérer, et qui nécessiteront un suivi pendant des années. Certains « restent par terre et ne reçoivent pas les soins nécessaires. Beaucoup perdent ainsi la vie », rapporte le communiqué du ministère.
Des opérations sans anesthésie
« Douze hôpitaux sont déjà hors service [sur un total de trente-cinq], soit parce qu’ils ont été bombardés soit parce qu’ils n’ont plus de carburant, et le reste des établissements accueillent au-delà de leurs capacités », s’alarme Nebal Farsakh, porte-parole du Croissant-Rouge palestinien. Plus de 90 % des médicaments sont épuisés, selon le directeur de l’hôpital Al-Shifa, le docteur Mohammed Abou Salmiya. Certains médecins rapportent pratiquer des opérations sans anesthésie. Des images montrent des chirurgiens qui travaillent en s’éclairant d’une lampe torche, ou à la lumière d’un téléphone portable.
Une soixantaine de camions d’aide humanitaire sont entrés dans l’enclave ces derniers jours – avant la guerre, plusieurs centaines assuraient quotidiennement l’approvisionnement de la population. Un navire militaire français a appareillé, mercredi, pour venir en aide aux hôpitaux gazaouis. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) exige un « cessez-le-feu humanitaire immédiat ». Deux résolutions en ce sens, l’une américaine, l’autre russe, ont échoué au Conseil de sécurité mercredi soir. Les ONG n’ont plus de mots assez forts pour alerter sur la gravité de la situation pour les quelque 2,4 millions de Gazaouis. « La famine est utilisée comme une arme de guerre contre les civils de Gaza », dénonce ainsi Oxfam, rappelant que des supermarchés et plusieurs boulangeries ont été visés par des bombardements israéliens.
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