Tollé dans la haute fonction publique après les attaques du RN contre les Français binationaux

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Inès Ben Kraiem, diplomate franco-tunisienne, à l’Institut du monde arabe, à Paris, le 27 juin 2024.

« Mettre en doute notre loyauté vis-à-vis de la France me heurte et me blesse. Je ne vis pas cette double appartenance comme un handicap, mais comme une richesse » : attaché de coopération auprès de l’ambassade de France en Libye, Sid Rouis est l’un des rares, au sein de l’appareil diplomatique français, à dénoncer ouvertement l’intention du Rassemblement national (RN) d’interdire aux Français binationaux d’accéder aux postes les plus « sensibles » de la fonction publique. La promesse est « terrifiante », dit ce Franco-Algérien, ancien numéro deux du cabinet de Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie sous François Hollande. Sid Rouis est né en Algérie. Il est arrivé en France en 1983, dans le cadre d’une procédure de regroupement familial. Sa prise de position est d’autant plus notable qu’il n’est pas fonctionnaire, mais contractuel pour le compte du ministère des affaires étrangères. « J’ai tout à perdre. Il faut bien mettre un coup de pied dans la fourmilière », justifie-t-il, bien conscient qu’il risque une sanction pour violation du devoir de réserve, et court le risque de ne pas voir son contrat renouvelé.

Le RN a beau minimiser la portée de cette démarche, l’onde de choc qu’elle suscite est réelle au sein de la haute administration française. Promise avec insistance par Jordan Bardella dans la campagne éclair en vue du premier tour des élections législatives, dimanche 30 juin, la mesure a suscité cette semaine de vifs échanges lors des débats entre les chefs de file des trois camps en lice. « C’est infamant et ridicule », a jugé Emmanuel Macron, vendredi 28 juin. Marine Le Pen elle-même a dû tancer un député RN qui s’en était pris à la double nationalité de l’ancienne ministre de l’éducation Najat Vallaud-Belkacem. « Quelques dizaines de postes sont concernés », a expliqué mardi le candidat du RN à la fonction de premier ministre en cas de cohabitation, sans préciser ce qu’il entend par « sensible », ou « stratégique ». « Vous voulez mettre un Franco-Russe à la tête d’une centrale nucléaire ? Ça vous pose pas un sujet d’intérêt national ? », a tenté de plaider M. Bardella.

L’argument peut paraître curieux de la part d’une formation désormais soucieuse, en pleine guerre d’Ukraine, de faire oublier sa proximité avec la Russie de Vladimir Poutine. Il ne contribue pas à rassurer les personnels détenteurs de deux passeports. « Il ne faut pas tomber dans le piège identitaire posé par le RN, mais partir des principes d’égalité et de non-discrimination », juge une diplomate française, disposant d’un passeport latino-américain – elle préfère rester discrète sur le pays concerné.

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