Il y a les incidents directement liés à la guerre : les incursions et bombardements ukrainiens sur les régions russes de Koursk et Belgorod, les attaques de drones sur des raffineries, l’explosion d’une bombe dans une poubelle à proximité d’un bureau de vote de la région occupée de Kherson… Mais la majorité des incidents qui ont perturbé le premier jour de scrutin présidentiel russe, qui se déroule du 15 au 17 mars, sont d’une nature plus inattendue. Dans des bureaux de vote des régions de Moscou, Voronej, Rostov-sur-le-Don ou encore en Crimée, des individus ont versé des produits chimiques (antiseptique, encre ou iode) dans les urnes ou sur les listes électorales. Ailleurs, d’autres ont tenté d’incendier urnes ou isoloirs.
En tout, quinze incidents de la sorte ont été répertoriés. Les autorités ont d’ailleurs indiqué que treize personnes avaient été arrêtées au cours de la journée pour des dégradations sur du matériel électoral, acte passible de cinq ans de prison.
Aucun mouvement d’opposition, même en exil, n’avait appelé à de tels actes, la seule action organisée étant un appel à voter de manière coordonnée dimanche (pour compliquer la fraude) à midi (pour créer une multitude de petits rassemblements) – initiative que les autorités ont qualifiée d’« extrémiste ».
Profils troublants
Les profils des saboteurs sont troublants : beaucoup sont âgés (on trouve une incendiaire de 83 ans à Mytichtchi, en banlieue de Moscou) et la plupart agissent téléphone en main, très calmes, semblant se filmer. En Oudmourtie, c’est une membre de la commission électorale qui a versé un produit dans une urne, criant un énigmatique : « Il le faut. »
Le mode opératoire rappellerait plutôt la vague d’attaques commises contre des bureaux de recrutement militaire ou des agences bancaires début 2023. Les assaillants étaient alors souvent des retraités escroqués ou manipulés, possiblement depuis le territoire ukrainien. Des inconnus leur promettaient qu’ils pourraient ainsi récupérer leur argent ou même qu’ils participaient à des opérations de police. Des jeunes gens ont aussi reçu de l’argent pour saboter des infrastructures ferroviaires.
La cheffe de la commission électorale, Ella Pamfilova, a d’ailleurs affirmé, sans plus de détails, que ces personnes agissaient pour de l’argent promis par « des salauds, de l’étranger ». Selon la commission, ces incidents ne perturbent pas le vote, puisque celle-ci affiche officiellement un taux de participation record au bout d’une journée de 36,09 %, avec une très forte utilisation du système de vote électronique à distance, auquel a eu recours Vladimir Poutine depuis un bureau du Kremlin.
