« Une imposition minimale de 15 % des multinationales ne réglera pas le problème des écarts d’imposition entre grands groupes et PME »

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C’est une mesure passée quasiment inaperçue dans le débat public, alors qu’elle a suscité un intense débat ces dernières années : le projet de loi de finances 2024 transpose en droit interne la directive européenne n° 2022/2523, elle-même issue de l’accord d’octobre 2021 signé entre les membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur la taxation des multinationales.

Est ainsi insérée au code général des impôts une disposition prévoyant un taux minimal d’imposition des bénéfices des multinationales de 15 %, mesure que les Etats membres de l’Union européenne doivent transposer pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2024.

Rappelons que l’accord de l’OCDE repose sur deux piliers, dont le taux minimal de 15 % est le second. Le premier, qui prévoit l’imposition des entreprises là où elles réalisent leurs bénéfices et vise plus spécifiquement les géants du numérique, ne fait toujours pas l’objet d’un accord. Le projet initial de l’OCDE n’est donc que partiellement appliqué.

Jusqu’à 150 milliards d’euros

Les premières estimations des recettes attendues de ce taux de 15 % vont de 1,5 à 4 milliards d’euros en France, et jusqu’à 150 milliards d’euros au niveau mondial. Il faut mettre cette fourchette en rapport avec les travaux du département des affaires fiscales du Fonds monétaire international, qui estime les pertes fiscales liées à l’évitement de l’impôt des grandes entreprises à plus de 600 milliards de dollars (environ 565 milliards d’euros) par an. Ce qui fait dire à Joseph Stiglitz, Prix Nobel d’économie 2001 et coprésident de la Commission indépendante pour la réforme de la fiscalité internationale des entreprises (Icrict) : « Un taux de 15 % est bien trop bas. Au sein de l’Icrict, nous soutenons un taux de 25 %. »

On ne peut qu’appuyer cette position. Même calculée sur l’éventuelle future base harmonisée que la Commission européenne souhaiterait voir entrer en vigueur le 1er juillet 2028, une imposition minimale de 15 % ne réglera pas le problème des écarts d’imposition entre grands groupes et PME. Elle ne freinera pas la concurrence fiscale puisque, au nom de ce taux, on pourrait assister à l’avenir à un alignement des taux de l’impôt sur les sociétés vers le bas.

Or, cette concurrence pèse de plus en plus lourdement sur les populations, les systèmes de protection sociale, les services publics et la capacité de l’action publique à faire face aux défis futurs, notamment environnementaux. Il faut en effet ajouter aux besoins de financement sociaux ceux de la bifurcation écologique.

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