Au Royaume-Uni, en Espagne ou en Allemagne, des hausses importantes du salaire minimum sans impact négatif sur l’emploi

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Affiche de campagne électorale pour un salaire minimum horaire à 12 euros du Parti social-démocrate (SPD) pour les législatives, à Berlin, le 23 août 2021.

Hausse de 22 % du salaire minimum en Espagne en 2019, de 15 % en Allemagne en 2022, de 10 % au Royaume-Uni en 2024. A travers l’Europe, les salaires minimaux sont devenus, ces dernières années, une arme de politique publique majeure. Avec sa promesse d’un smic net à 1 600 euros, le Nouveau Front populaire se place dans la même logique. Ce « coup de pouce » représenterait une augmentation d’un peu plus de 14 %.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Comment le smic a rattrapé des millions de salariés

L’idée provoque une vive polémique. « Une machine à détruire l’emploi », tonne le premier ministre, Gabriel Attal, qui parle de 500 000 emplois détruits. L’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) calcule inversement une destruction nette de seulement 29 000 emplois, un niveau faible à l’échelle d’une économie comme la France.

« Une telle hausse représente à la fois un choc d’offre, avec une hausse des coûts pour les entreprises, mais c’est aussi un choc de demande, avec une amélioration des salaires d’une partie de la population », explique Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision de l’OFCE et auteur de ce calcul. On peut aussi noter que l’évolution de l’emploi dans l’Hexagone concentre les petits salaires dans les métiers des services (propreté, distribution, logistique…), difficiles à délocaliser.

L’expérience des pays voisins montre qu’il n’y a pas eu de vaste destruction de postes. La comparaison doit être prise avec prudence, les marchés du travail étant différents. Au Royaume-Uni et en Allemagne, notamment, le taux de chômage est très faible (autour de 4 %, contre 7,5 % en France). De même, le taux de « smicardisation » (le pourcentage de salariés au smic) y est inférieur à celui de la France (6,7 % au Royaume-Uni, 13,7 % en Espagne, 14,8 % en Allemagne, 17 % en France). « Les travaux sur l’Espagne montrent un impact négatif sur l’emploi, mais assez peu important, note Eric Dor, directeur des études économiques à l’Ieseg, une école de commerce. Attention toutefois : le salaire minimum était alors très inférieur au niveau actuel français ! Par ailleurs, on est dans une situation en France où beaucoup d’entreprises sont déjà fragilisées. »

Mais d’abord, une mise en perspective. La France a longtemps eu l’un des salaires minimaux les plus élevés d’Europe. C’est de moins en moins vrai. A 1 766 euros brut, il s’agit du cinquième plus élevé de l’Union européenne à parité de pouvoir d’achat, derrière l’Allemagne, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Belgique. Les autres pays du Vieux Continent ont effectué un fort rattrapage ces dernières années. Depuis 2018, le smic en France a progressé de 18 %, nettement moins qu’en Espagne (54 %), en Allemagne (36 %), en Irlande (33 %) ou aux Pays-Bas (31 %). Dans le jeu de la concurrence européenne, l’Hexagone est certes dans la moyenne haute, mais n’est plus un cas à part.

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