
La rivalité entre les deux Olympiques alimente la chronique de la Ligue 1 depuis quelques années. Mais elle vient de franchir un palier supplémentaire dans la violence. Après une réunion d’une cellule de crise de la Ligue professionnelle de football (LFP), il a été décidé que la rencontre entre Marseille (OM) et Lyon (OL) n’aurait pas lieu, dimanche 29 octobre. L’annonce a été faite par le speaker aux spectateurs présents en tribunes à 20 h 42, trois minutes avant l’horaire prévu pour le coup d’envoi. En cause : l’attaque du bus du club rhodanien, pendant son trajet vers le Stade-Vélodrome, lors de laquelle l’entraîneur, Fabio Grosso, a été blessé.
Dernier de Ligue 1, en pleine crise, l’OL se présentait en bête meurtrie dans la cité phocéenne pour cette 10e journée du championnat de France. La métaphore s’est matérialisée d’autant plus brutalement à l’arrivée du car transportant l’équipe. Comme c’est souvent le cas lors des déplacements des Lyonnais à Marseille, le véhicule a été pris pour cible par des jets de pavés. Cette fois, la vitre avant droite a été complètement brisée, une autre en partie endommagée. Sur les images du diffuseur, Prime Video, on aperçoit le staff et la sécurité du club rhodanien faire signe aux caméras d’arrêter de filmer. Un sac ensanglanté est brandi : preuve du violent incident qui vient de se produire.
Le sang appartient à Fabio Grosso, l’entraîneur italien de l’OL. Atteint par un des projectiles, il a été soigné dans l’infirmerie du stade. Il a reçu des points de suture pour soigner une entaille de 3 centimètres, toute proche de l’œil. Il a aussi été victime de nombreux vertiges et souffre de traumatismes multiples. Son adjoint, Raffaele Longo, a lui aussi été touché.
Interrogé par Prime Video, John Textor, le président américain du club, a donné des détails sur la blessure de son coach : « Il n’était plus lucide. C’est une scène choquante. J’ai essayé de discuter avec lui mais il semble qu’il ait une commotion. » Fabio Grosso a été transféré à l’hôpital pour subir des examens supplémentaires.
« Une prise de conscience collective »
Les joueurs lyonnais ont, dans un premier temps, exprimé leur volonté de disputer le match, avant de prendre la mesure de l’état de santé de leur entraîneur et de son adjoint. « Notre équipe voulait jouer. Je suis très fier de notre capitaine [Anthony Lopes], son attitude a été très émouvante », a ainsi raconté John Textor. Après consultation des différents acteurs – les deux clubs, les autorités publiques, les représentants de la LFP et l’arbitre –, la cellule de crise a finalement décidé que le coup d’envoi ne serait pas donné ce dimanche soir.
L’arbitre, M. Letexier, a été chargé de présenter la décision, lors d’une courte conférence de presse, peu avant 21 heures : « Il y a eu une constatation des blessures des membres du staff de l’OL. Le club n’a pas souhaité que la rencontre ait lieu. Un souhait en accord avec le protocole de la LFP, qui prévoit que lorsqu’un acteur terrain est blessé pour des raisons physiques ou psychologiques la rencontre ne peut pas avoir lieu. » Une position également soutenue par l’OM. « Il y a eu une prise de conscience collective de la gravité des faits », a insisté, par la suite, M. Letexier.
Président délégué de l’OM, Pablo Longoria a adressé ses pensées à Fabio Grosso : « C’est inadmissible ce qui lui est arrivé. Même si c’est arrivé hors du stade, je suis en colère contre ces inconscients [les auteurs de l’agression]. Je suis consterné et cela n’a pas sa place ni dans le football, ni dans la société. » L’allusion au fait que les incidents se sont produits à l’extérieur du Vélodorme n’est pas fortuite. En matière de sécurité, la responsabilité des clubs s’arrête à l’enceinte de leur stade. En novembre 2021, un jet d’une bouteille en plastique sur le joueur marseillais Dimitri Payet, à Lyon, avait conduit à une sanction sportive d’un point contre l’OL et au report du match.
L’OL va porter plainte
La LFP a fait savoir qu’« il appartiendra désormais à la commission des compétitions de se prononcer sur le sort de cette rencontre par application de l’article 544 du règlement des compétitions ». Les autorités du football devront trouver l’équilibre entre le respect du règlement et le désir d’adresser un message fort face à une agression sans précédent dans l’histoire pourtant mouvementée de la Ligue 1.
De son côté, l’OL a annoncé, un peu plus tard dans la soirée, son intention de porter plainte et « accompagnera toute personne qui souhaitera faire de même ». « L’Olympique lyonnais regrette que ce type de situation se reproduise chaque année à Marseille et invite les instances à prendre la mesure de la gravité et de la répétition de ce type d’incidents avant qu’un drame encore plus grave ne se produise », insiste le club dans un communiqué.
Ce dimanche, un bus de supporteurs rhodaniens avait également été caillassé, ses vitres impactées et certains passagers blessés. Six cents fans lyonnais avaient été autorisés à effectuer le déplacement à Marseille par la préfète de police. Le match était classé 4 sur 5 par les services de la division nationale de lutte contre le hooliganisme, c’est-à-dire à haut risque.