Un week-end, deux derniers jours : Thibaut Pinot est sur le point de tourner la page Tour de France du livre de sa carrière. Une épreuve qu’il a mis du temps à apprécier, qu’il a presque fui par moments. Trop grande, trop oppressante, trop éprouvante pour celui qui n’attend qu’une chose une fois la ligne d’arrivée franchie sur les Champs-Elysées, dimanche 23 juillet : retrouver son « potager, tout seul, tranquille, en silence ».
Depuis le grand départ de Bilbao (Espagne), le 1er juillet, le Franc-Comtois a aidé son leader, David Gaudu, dans les moments difficiles. Il s’est aussi placé au classement général (12e à 27 min 26 s), mais il lui a manqué l’essentiel : une victoire d’étape. Présent à quatre reprises dans l’échappée pour atteindre son seul objectif affiché, Thibaut Pinot n’est pas passé très loin en se classant deux fois sixième, à Belleville-en-Beaujolais (Rhône), lors de la 12e étape, et à Saint-Gervais Mont-Blanc (Haute-Savoie), trois jours plus tard. « Il faut jouer, il faut tenter, je ne regrette pas du tout, confiait-il, lundi 17 juillet. Mon Tour a été ce que je voulais qu’il soit. »
Pendant trois semaines, le grimpeur de la formation Groupama-FDJ a surtout été acclamé partout où il est passé. « Je ne m’y attendais pas forcément, mais c’est sûr que l’engouement est monté d’un cran par rapport aux autres années », dit-il, six mois après avoir annoncé qu’il mettra un point final à sa carrière en fin de saison. Les pancartes brandies sur le bord des routes en attestent. Pêle-mêle : « Merci Thibaut », « Bonne retraite Thibaut » ou « Thibaut, la retraite, c’est à 64 ans », dans un dernier espoir de prolonger le bonheur. « Je suis prêt à arrêter et aucune victoire ne pourrait me faire changer d’avis », répond-il, serein.
Le coureur le reconnaît, cette ferveur lui fait parfois « peur ». « Moi qui suis un peu sauvage, un peu timide, c’est quand même beaucoup de monde tous les jours. » Le Français ne parvient d’ailleurs pas toujours à comprendre l’admiration qu’il suscite, avouant avoir « l’impression de ne pas le mériter », parce qu’il « ne pense pas avoir marqué la [dernière] décennie du [cyclisme professionnel] ».
Un « virage Pinot » dans le col du Petit Ballon
En pleine séance d’introspection, Thibaut Pinot ose une explication : « Si j’étais supporteur, je pense que j’aimerais, chez moi, ce côté un peu décalé d’un coureur qui vit tout simplement en dehors du vélo. » « C’est très difficile à expliquer, totalement irrationnel, avoue Charly Moriceau, fan de longue date du natif de Mélisey (Haute-Saône). C’est un coureur rare, un mec presque normal, sauf qu’il ne fonctionne pas comme les autres socialement. Il est humain, il ne ment à personne, ne calcule pas sa communication. »
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