Michael E. Mann, climatologue : « Le climat ne cesse de se dégrader, et c’est déjà très grave. Mais rien ne prouve que des points de non-retour aient été franchis »

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Plus de 50 °C aux Etats-Unis et en Chine, autour de 45 °C en Italie, en Espagne ou en Grèce, des inondations meurtrières en Corée du Sud, des incendies qui font rage au Canada ou encore une température inédite de l’Atlantique Nord : la planète est soumise à des catastrophes climatiques en série. Le mois de juillet pourrait être le plus chaud jamais enregistré, après celui de juin. Le climatologue Michael E. Mann, directeur du centre pour les sciences et l’environnement de l’université de Pennsylvanie (Etats-Unis), réfute l’idée d’une accélération du réchauffement, mais prévient que nous pourrions franchir des points de bascule si nous continuons à utiliser des énergies fossiles.

Des secouristes sud-coréens recherchent des personnes disparues dans un tunnel souterrain où une quinzaine de voitures ont été piégées par de fortes pluies à Cheongju le 16 juillet 2023.

La succession actuelle d’extrêmes et de records marque-t-elle une nouvelle normalité ?

C’est pire qu’une nouvelle normalité : c’est un référentiel qui change constamment, avec des effets qui ne cesseront de s’aggraver, partout dans le monde, tant que nous continuerons à brûler des combustibles fossiles [charbon, pétrole et gaz] et à générer des émissions de gaz à effet de serre. Non seulement nous verrons de nouveaux records battus, mais ils voleront en éclats sous l’effet de la crise climatique. Cette année, le phénomène El Niño, un réchauffement du Pacifique équatorial qui peut augmenter les températures mondiales, se surajoute à cette tendance.

Le climat est-il entré dans une phase hors de contrôle ?

Ce n’est pas le cas. Le climat ne cesse de se dégrader, et c’est déjà très grave. Mais nous ne sommes pas encore près d’une quelconque réaction d’emballement et rien ne prouve que des points de non-retour aient été franchis. Cependant, ces derniers pourraient être atteints si nous continuons à brûler des combustibles fossiles et donc à réchauffer la planète. Nous avons encore le temps d’empêcher les pires effets de se produire si nous agissons maintenant.

Pour des scientifiques comme Johan Rockström, qui dirige le Potsdam Institute for Climate Impact Research, nous aurions déjà dépassé sept des huit limites planétaires « sûres et justes », des seuils au-delà desquels l’humanité serait en péril…

Je pense qu’il y a un malentendu linguistique. Parlons-nous de points de bascule climatiques ou de points de bascule sociétaux ? Ce n’est pas la même chose. Un réchauffement constant et linéaire pourrait en principe conduire à un point de bascule sociétal, car il existe un seuil au-delà duquel le système complexe de l’économie ne peut plus fonctionner. Mais rien ne prouve que la situation soit devenue incontrôlable d’un point de vue climatique. Au contraire, elle s’aggrave de façon continue à mesure que la planète se réchauffe sous l’effet de nos activités. Et il n’y a pas le moindre consensus au sujet des limites planétaires.

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