« Ni les assureurs ni les gouvernements ne sont préparés à l’augmentation exponentielle des pertes liées au risque climatique »

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En 2015, à la veille de l’ouverture de la COP21, Henri de Castries, PDG d’Axa, affirmait qu’« une augmentation de deux degrés de la température moyenne dans le monde [pouvait] encore être assurable, mais ce qui [était] certain, c’est qu’une hausse de quatre degrés ne l’[était] pas ». Huit ans après, le ministre de la transition écologique annonce que « la France va se préparer à une élévation de 4 °C. » Doit-on alors se préparer à un monde sans assurance ?

L’assurance fonctionne en mutualisant les risques entre de larges groupes de personnes qui paient des primes, puis en versant cet argent aux personnes qui ont subi un sinistre. Cette vision, certes un peu simpliste, correspond au fonctionnement d’une mutuelle d’assurances, les cotisations servant à indemniser les plus malchanceux. Compte tenu de la nature fondamentalement aléatoire des contrats d’assurances, on espère (au sens mathématique) que les primes permettront de couvrir les pertes. Avec ce raisonnement « en moyenne », une année sur deux, les assureurs feraient du profit et, une année sur deux, ils n’auraient pas assez d’argent pour indemniser les personnes sinistrées. Pour éviter ce genre de désagrément, la législation impose aux assureurs d’avoir suffisamment de capital pour garantir leur solvabilité. Cela permet de protéger les assurés qui ont acheté la promesse d’une indemnisation dans plusieurs mois si une mésaventure survient.

Ce mécanisme fonctionne en assurance automobile ou en assurance habitation quand il faut indemniser un incendie dans la cuisine ou à la suite d’un accident, mais il est mis à mal quand des catastrophes climatiques surviennent. L’assurabilité des risques est en effet caractérisée par trois facteurs : le risque assurable doit être quantifiable et distribué entre un grand nombre d’assurés, la population assurable doit être consciente du risque et être prête à payer la prime d’assurance, et un assureur solvable doit être prêt à porter le risque.

Panique sur le marché

Malheureusement, le changement climatique menace ces trois conditions : les risques physiques peuvent se combiner ou s’accélérer de manière inédite ; leurs horizons de long terme peuvent brouiller la compréhension des risques par les consommateurs ; des pertes potentiellement massives et durables peuvent dépasser la capacité de couverture des assureurs.

Les incendies de forêt en Californie en 2017 et en 2018 ont conduit les assureurs à payer près de 29 milliards de dollars (26 milliards d’euros) de dégâts, alors qu’ils n’ont perçu que 15 milliards de dollars de primes. Et, depuis 2020, huit catastrophes ont causé entre 20 milliards et 50 milliards de dollars de dommages. La Californie compte une centaine de compagnies proposant des contrats d’assurance habitation. Fin mai, la plus grosse d’entre elles, State Farm, a fait paniquer le marché en déclarant qu’elle arrêterait toute nouvelle souscription dans l’Etat, en raison de l’augmentation des coûts de construction, du risque croissant d’incendies de forêt et de l’augmentation du coût de la réassurance [garantie échangée entre différents assureurs].

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