
Dans la famille Tamimi, cet automne, Bassem, le père, est le premier à avoir été arrêté par l’armée israélienne. Le 29 octobre, l’activiste palestinien de 56 ans est interpellé à la frontière entre les territoires occupés et la Jordanie, où il allait retrouver un oncle et des cousins résidant à Amman, la capitale. Il a tout juste le temps de contacter son épouse, Nariman, pour la prévenir. « Je l’ai rappelé dans la foulée, mais son téléphone était déjà éteint », soupire-t-elle, dans le salon de sa maison, à Nabi Saleh, au centre de la Cisjordanie.
Ce 2 novembre, en hidjab bordeaux et tunique noire, Nariman Tamimi raconte l’arrestation, sans savoir qu’une autre suivra quelques jours plus tard : dans la nuit du 6 novembre, une quinzaine de soldats de l’armée israélienne, suivis par trois Jeep, débarquent vers 3 h 30 du matin dans l’une des deux rues du village de cinq cent soixante habitants, tous de la famille Tamimi. Ils viennent arrêter sa fille aînée, Ahed, 22 ans. Elle est la plus célèbre des militantes palestiniennes. Sa famille, les Tamimi, aux milliers de membres à travers le monde arabe, n’est pas un clan comme les autres : son engagement, raconté jour après jour sur les réseaux sociaux, est connu partout sur la planète.
Selon un porte-parole de l’armée, Ahed est accusée d’« incitation au terrorisme ». Les autorités israéliennes lui reprochent la publication sur Instagram, le 30 octobre, d’un message, en hébreu et en arabe, adressé aux habitants des colonies juives en Cisjordanie, illégales selon le droit international : « Nous allons vous abattre et vous direz que ce qu’Hitler vous a fait était une blague. Nous allons boire votre sang et manger votre crâne. » Plusieurs membres de sa famille affirment que la jeune diplômée en droit, qui ne parle pas hébreu, n’a « jamais écrit » ces deux phrases.
Le compte Instagram sur lequel ces menaces ont été publiées « ne lui appartient pas », soutient Nariman Tamimi, qui pointe les dizaines de profils au nom de sa fille sur les réseaux sociaux, créés par des inconnus. Après plusieurs jours sans nouvelles, elle a appris, par l’intermédiaire d’un avocat, que sa fille avait été transférée sur le territoire israélien, à la prison de Damon, au sud d’Haïfa, où elle aurait été « battue ». Nariman Tamimi assure que le capitaine qui a passé les menottes à sa fille lui a lancé : « On a commencé par arrêter Bassem, je suis en train d’arrêter Ahed et je reviendrai pour arrêter votre fils, Wa’ed, avant de finir par vous. »
Tous les pans de la résistance palestinienne
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