
L’essence, c’est le sang qui a cessé de couler dans le corps brisé de la bande de Gaza. Elle manque plus que tout, sous l’effet du blocus quasi total qu’impose Israël à l’enclave. Depuis le début de la guerre, le 7 octobre, les générateurs qui alimentent les immeubles en électricité se sont éteints peu à peu. On ne fuit plus désormais la ville de Gaza qu’à pied ou sur des chariots tirés par des ânes – qui se font rares et chers. Les ambulances ne roulent plus depuis ces derniers jours et tous les hôpitaux de la cité sont à l’arrêt, sauf un.
Des habitants préservent quelques litres au fond du réservoir de leur voiture pour recharger une batterie, sur laquelle des voisins branchent une dizaine de téléphones, afin de n’être pas coupés du monde. Le 16 novembre, le réseau téléphonique s’est éteint pour la quatrième fois : l’essence manque aux générateurs qui alimentent les centres de données et de connexion des opérateurs. Depuis cinq jours, les pluies d’automne ont commencé. Les déplacés de Khan Younès, au sud, étendent des bâches de plastique sur leurs camps de fortune. Ils cherchent les vêtements d’hiver qu’ils n’ont pu emporter dans leur fuite.
Vendredi 17 novembre, Israël a accepté, dans l’extrême urgence et au prix de convulsions politiques, le passage de quatre camions-citernes dans l’enclave, via l’Egypte. Une goutte d’eau, de l’aveu même du conseiller à la sécurité nationale, Tzachi Hanegbi. Mais Washington comme l’armée et le renseignement intérieur ont recommandé au gouvernement cette concession exclusive aux agences des Nations unies, afin qu’elles maintiennent en activité minimale les stations de désalinisation et de traitement des eaux usées : sans elles, la crise sanitaire massive dans laquelle Gaza s’enfonce déjà aurait subi une accélération brutale et gêné l’opération militaire.
L’essence promise doit aussi alimenter les réservoirs des opérateurs téléphoniques, puisque les Nations unies affirment ne pas pouvoir distribuer d’aide sans communications.
Livraison controversée en Israël
Mercredi, un camion-citerne avait déjà pu passer le poste-frontière de Rafah, afin que les véhicules des Nations unies puissent acheminer de l’eau et de la nourriture, qui franchissent elles aussi la frontière en quantité minimale (10 % des besoins depuis le 7 octobre, plus rien depuis trois jours). L’ONU les transporte dans ses écoles, où les Gazaouis cherchent refuge contre les bombardements, qui y ont fait 71 morts, sur plus de 11 000 au total, selon le ministère de la santé administré par le Hamas.
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