Une petite foule s’est rassemblée sur la place Maïdan, à Kiev, des femmes essentiellement, venues réclamer la démobilisation de leurs maris après dix-huit mois de service dans l’armée. Ce dimanche 12 novembre, sur la place centrale de la capitale ukrainienne, quelques dizaines d’épouses, pour certaines accompagnées de leurs enfants, bravent le vent et la pluie, pancarte en main. « Parti défendre un pays libre et devenu un serf de la guerre » ; « Maintenant, c’est au tour des autres ». Une petite fille tient une affichette avec des lettres roses : « C’est à mon tour de faire un câlin à mon père ».
« Nous voulons une limite dans le temps, car il y a aujourd’hui ce sentiment que tu peux entrer dans l’armée pour ne jamais en sortir », explique Anastasiia Troshyna, 23 ans, dont le mari, Oleg, combat dans le Donbass, dans l’est du pays, dans la région de Donetsk. « Ils sont fatigués, démotivés, ils veulent du repos », insiste la jeune femme en évoquant son mari et les soldats de son unité. « Ils veulent venir ici, voir leurs enfants et leurs proches. »
Sous la loi martiale, la démobilisation ne peut se faire qu’en cas de blessures graves, pour des raisons familiales impérieuses ou passé l’âge limite de la mobilisation, fixé à 60 ans. Depuis qu’Oleg s’est engagé, en mars 2022, Anastasiia n’a pu le retrouver qu’à une seule occasion, lorsqu’il a été envoyé dans un hôpital de la capitale pour une blessure à la jambe. Si la loi ukrainienne stipule que les soldats ont le droit à trente jours de congé par année, « cette loi ne marche pas, assure son épouse, car il n’y a personne pour les remplacer ».
Refus de s’enrôler de certains
C’est là une autre ambition de ces petites manifestations qui rassemblent des dizaines de femmes dans plusieurs villes du pays depuis deux semaines : convaincre ceux qui n’ont pas encore combattu de rejoindre les forces armées. « J’ai des gens autour de moi qui veulent y aller mais qui hésitent, car ils ne savent pas combien de temps ça va durer, affirme Anastasiia Troshyna. Est-ce que ce sera pour cinq ans ? Pour dix ans ? Aujourd’hui, le sentiment, c’est que tu dois être là-bas jusqu’à la fin. »
Pour Olha, qui a refusé de donner son nom de famille, une démobilisation après dix-huit mois permettrait de donner des perspectives. « Personne ne veut aller se battre et ceux qui sont à la maison se rendent compte qu’il n’y a pas de fin, dit-elle. On y va jusqu’à ce qu’on meure ou qu’on devienne handicapé. Peut-être que cela motivera d’autres, peut-être que cela atténuera un peu leurs craintes, parce que les gens ont peur, peur d’aller là-bas et de mourir. »
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