Est-ce l’esquisse encore très ténue d’une désescalade ou bien un faux espoir ? Un mois après les massacres perpétrés contre des civils israéliens par le Hamas et alors que la bande de Gaza est soumise à un assaut sans précédent de la part de l’armée israélienne, le président des Etats-Unis, Joe Biden, a annoncé jeudi 9 novembre que l’Etat hébreu allait quotidiennement suspendre ses opérations pendant quelques heures.
Cette annonce est à accueillir froidement. Il ne s’agit pas en effet des « pauses humanitaires » que réclament, jusqu’à présent sans succès, les Etats-Unis. Il s’agit encore moins de trêves comme celles qui font actuellement l’objet de tractations difficiles avec la médiation du Qatar, et qui pourraient faciliter la libération, impérative, des dizaines d’otages retenus à Gaza.
Ces arrêts sont envisagés uniquement pour permettre aux civils palestiniens de quitter leurs foyers situés dans des parties de l’étroite bande de terre livrées aux combats. De nouveaux déplacements de populations, donc, préalables à de nouvelles opérations militaires. Un responsable israélien a jugé bon le jour même de l’annonce de nier la réalité d’une crise humanitaire à Gaza. L’urgence est pourtant déjà là, et les interruptions des combats envisagées n’y répondent en rien.
Les alliés occidentaux d’Israël, qui mesurent auprès de leurs opinions publiques, chaque jour qui passe, les retombées délétères de cet embrasement, se retrouvent piégés par le soutien sans guère de réserves apporté à Israël aussitôt après les massacres du 7 octobre.
Destruction de 45 % des habitations de Gaza
La conférence humanitaire organisée à Paris, également le 9 novembre, a souligné cette impuissance. On ne peut, certes, que se féliciter de sa tenue, ne serait-ce que parce qu’elle a placé au centre de l’attention les dramatiques conditions de survie des civils de Gaza. Mais les promesses d’aides d’un montant de 1 milliard d’euros annoncées à cette occasion se heurtent à l’absence de cessez-le-feu, préalable indispensable à l’acheminement et à la distribution d’une assistance désormais cruciale. C’est ce qui explique le lourd scepticisme exprimé par les organisations internationales et non gouvernementales aux prises avec les conséquences de cette guerre.
Emmanuel Macron en a pris acte en liant « une pause humanitaire la plus rapide possible » et la nécessité d’« œuvrer à un cessez-le-feu ». Au bout de quatre semaines de bombardements, puis d’opérations au sol, une évidence s’impose : la configuration de Gaza rend incompatible la poursuite d’une opération militaire d’une telle envergure et la prise en compte du sort des civils. Permettre la première tout en disant vouloir garantir la seconde, ce qui reste la position de Washington, relève de plus en plus de l’acrobatie rhétorique, ou de l’hypocrisie.
Le coût de la destruction méthodique de parties entières de Gaza, qu’Israël justifie par la nécessité d’anéantir les infrastructures militaires du Hamas, apparaît déjà exorbitant. Le Programme des Nations unies pour le développement a rendu publiques jeudi ses premières estimations de l’impact de cette nouvelle guerre qui a déjà fait des milliers de morts palestiniens selon les autorités américaines. Elles sont glaçantes : destruction partielle ou totale de 45 % de l’ensemble des habitations à Gaza, contraction, en un mois, de 4 %, dans l’ensemble des territoires palestiniens, d’une économie étranglée par les contraintes israéliennes avant même l’attaque du Hamas. Il faut mettre un terme au plus vite à cet effondrement.