Le kibboutz de Nahal Oz, au nord-est de la bande de Gaza, a été une des localités martyrisées par l’offensive terroriste du Hamas, le 7 octobre. Il fut, en 1951, la première implantation de la « Jeunesse pionnière combattante », dont l’acronyme hébreu est Nahal. Ce programme Nahal, conçu par David Ben Gourion à l’issue de la première guerre israélo-arabe de 1948-1949, visait à ancrer des avant-postes, à la fois civils et militarisés, dans les zones frontalières les plus sensibles.
En avril 1956, un des gardes de Nahal Oz, Roï Rothberg, fut assassiné par des Palestiniens infiltrés de Gaza. L’émotion fut alors telle en Israël que le chef d’état-major, Moshe Dayan, vint en personne à Nahal Oz prononcer un éloge funèbre dont les mots résonnent tout particulièrement dans la tragédie actuelle.
« Le prix du sang »
« Aujourd’hui ne maudissons pas ses assassins. Que savons-nous de leur haine sauvage envers nous ? Ils vivent depuis huit ans à Gaza dans des camps de réfugiés, tandis que nous nous emparons sous leurs yeux des terres et de leurs villages où ils vécurent et où vécurent leurs ancêtres. Ce n’est pas aux Arabes de Gaza qu’il faut demander le prix du sang, mais à nous-mêmes. » Le chef d’état-major adjurait alors ses compatriotes de ne jamais oublier que, « au-delà du sillon qui marque la frontière, s’étend un océan de haine avec un désir de revanche ».
En novembre 1956, les troupes israéliennes occupaient la bande de Gaza avec l’objectif affiché d’y liquider la présence des fedayins, ainsi que sont dénommés les combattants palestiniens. Les quatre mois d’occupation firent un millier de morts dans la population de Gaza, soit un habitant sur trois cents.
Dix ans plus tard, Dayan, devenu ministre de la défense, s’emparait de nouveau de la bande de Gaza, avec Yitzhak Rabin comme chef d’état-major. Les deux héros de cette guerre des Six-Jours, en juin 1967, étaient favorables à une occupation sans colonisation. Dayan ordonna d’effacer toute séparation visible entre Israël et le territoire palestinien, dont la population était encouragée à travailler en Israël, faisant bientôt de ces salaires la principale ressource de Gaza.
Dayan rejoignit le gouvernement de Menahem Begin comme ministre des affaires étrangères, après la victoire historique du Likoud, en mai 1977, sur les travaillistes. Mais Begin ne conclut, en mars 1979, la paix avec l’Egypte que pour pouvoir mieux coloniser la Cisjordanie et Gaza, conduisant Dayan à la démission. Le jusqu’au-boutisme du Likoud finit par susciter l’émergence en Israël d’un « camp de la paix », vainqueur des élections de juin 1992 sous la direction du travailliste Rabin.
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