LETTRE DE LONDRES
Les prisons britanniques sont pleines. Tellement saturées que le gouvernement de Rishi Sunak en est réduit à des mesures extrêmes. Lundi 16 octobre, le ministre de la justice, Alex Chalk, a annoncé que des milliers de personnes détenues en Angleterre et au Pays de Galles condamnées à moins de quatre ans d’incarcération allaient être libérées dix-huit jours avant la fin de leur peine. Le gouvernement va en outre proposer un projet de loi pour que des milliers de Britanniques puissent purger leur peine dans des établissements à l’étranger et il a promis d’accélérer les expulsions de binationaux condamnés.
Enfin, il a assuré que le gouvernement voulait privilégier les travaux d’intérêt général au lieu des condamnations à de courtes peines (moins d’un an). Une proposition déjà faite par les ministres conservateurs de la justice Ken Clarke, en 2010, et David Gauke, en 2019, mais à chaque fois abandonnée.
La mesure de libération anticipée « ne s’appliquera à aucune personne condamnée pour violence aggravée, crime sexuel ou terrorisme. (…) Nous ne prendrons pas de mesures mettant en danger la sécurité des Britanniques », a insisté M. Chalk, qui a promis qu’en parallèle, les personnes condamnées pour les crimes les plus graves ne bénéficieront plus de remises de peine. « Les pires criminels, les meurtriers, les violeurs seront emprisonnés le plus longtemps possible. Il ne sera plus question que des responsables de crimes haineux soient libérés après n’avoir purgé que les deux tiers de leur peine », a affirmé le ministre.
En Angleterre et au Pays de Galles, qui partagent le même système judiciaire – l’Ecosse et l’Irlande du Nord disposent des leurs –, la population carcérale a atteint 88 225 personnes, au plus haut depuis 2011, selon un décompte publié mi-octobre par le ministère de la justice. Cette population a augmenté de 13,4 % entre avril 2021 et avril 2023, contraignant le gouvernement à agir en urgence. A la mi-octobre, même en plaçant plusieurs détenus dans des cellules individuelles, il ne restait plus que 557 places libres dans les 120 prisons galloises et anglaises.
Evasion spectaculaire début septembre
En cause, une recrudescence des condamnations, après la mise à l’arrêt de la justice pendant de nombreux mois durant la pandémie de Covid-19, des tribunaux en manque de juges après des années d’austérité (environ 15 500 personnes sont incarcérées en l’attente de leur procès). Et des peines qui n’ont cessé de s’allonger, alors que les gouvernements conservateurs successifs n’investissaient pas en proportion pour agrandir les prisons ou en créer de nouvelles : beaucoup d’établissements datent de l’ère victorienne.
Il vous reste 56.38% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.