LETTRE DE BRUXELLES
La montée des droites radicales – extrêmes, populistes, nationalistes… – sur le Vieux Continent met le Parlement européen sous pression. Et pas seulement parce qu’elle menace les grands équilibres politiques de l’Hémicycle communautaire après les élections de juin 2024. Au sein des trois grands groupes politiques – les conservateurs du Parti populaire européen (PPE), les sociaux-démocrates (S&D) et les libéraux de Renew –, ces mouvances ont en effet leurs relais et cela crée des débats parfois difficiles. « Ce n’est pas un phénomène nouveau », affirme Nathalie Brack, enseignante à l’Université libre de Bruxelles (ULB). Avant de poursuivre : « Avec l’élargissement de l’Union européenne et l’arrivée de nouveaux partis, il est devenu plus prégnant. Maintenant que les questions d’Etat de droit sont au cœur de l’agenda européen, il est plus visible. »
Dernier exemple en date : cette semaine, à l’occasion de la plénière à Strasbourg, les S&D devraient suspendre leurs trois élus slovaques, issus du parti de Robert Fico, le SMER-SD, qui, après sa victoire aux élections législatives du 30 septembre, a signé un accord de coalition avec l’extrême droite. Le groupe suit ainsi une décision prise, le 12 octobre, par le Parti socialiste européen (PSE).
« Nous devons être très clairs sur une chose : si [le SMER-SD] veut rester dans cette famille, il ne doit pas passer d’accord avec l’extrême droite, ou s’il passe des accords avec l’extrême droite, il doit quitter le PSE », avait déclaré le 5 octobre le premier ministre portugais, Antonio Costa. « On ne pouvait pas faire campagne pour les élections européennes avec le SMER », ajoute Raphaël Glucksmann, qui s’inquiète depuis longtemps des dérives « xénophobes, machistes, homophobes et pro-Kremlin » de Robert Fico.
Cela fait des mois que le social-démocrate français demande l’exclusion de son parti. C’est une « question de principe », juge-t-il. S’il se réjouit d’avoir été entendu quand il a milité, en mars, pour l’exclusion du parti géorgien au pouvoir, le très prorusse Rêve géorgien, il regrette que le cas slovaque ait fait l’objet de plus de mansuétude.
« Tension » entre une volonté d’élargissement et de cohérence
De fait, la Géorgie n’est pas membre de l’Union européenne (UE), contrairement à la Slovaquie, qui fournit des élus au Parlement européen et dont le chef de gouvernement siège à la table du Conseil européen. Dans ce contexte, le président du PSE ne souhaitait pas agir tant que Robert Fico n’avait pas franchi de ligne rouge, par exemple en s’alliant avec l’extrême droite slovaque.
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