Depuis qu’elle a dû céder la direction du gouvernement norvégien au travailliste Jonas Gahr Store, en octobre 2021, après l’avoir occupée pendant huit ans, rien ne semblait pouvoir empêcher la conservatrice Erna Solberg de redevenir première ministre à l’issue des prochaines législatives, en 2025. Les dernières élections locales, le 11 septembre, avaient été de bon augure : pour la première fois depuis 1924, le parti Hoyre, qu’elle dirige depuis 2004, arrivait en tête devant celui de Jonas Garh Store.
Quelques jours plus tard, sa victoire était balayée par une déferlante de scandales qui secoue encore la classe politique norvégienne. Il faut dire que, depuis le 30 juillet, le journal économique E24 demandait à Erna Solberg, 62 ans, de rendre publique la liste des opérations boursières effectuées par son époux, Sindre Finnes, pendant qu’elle était première ministre, entre 2013 et 2021.
Le 15 septembre, Sindre Finnes, cadre auprès de la fédération des industries norvégiennes, finit par obtempérer. A la surprise générale, il annonce avoir effectué plus de trois mille transactions, pour un gain estimé de 1,8 million de couronnes (157 000 euros). Certaines de ces opérations concernent des entreprises publiques et entretiennent le doute sur les informations dont il disposait à l’époque.
Lors d’une conférence de presse, Erna Solberg, au bord des larmes, évoque « une rupture de la confiance » dans son couple. Elle assure que son mari lui a menti et admet qu’elle a pu se rendre coupable de conflits d’intérêts à son insu. Pour autant, elle refuse de démissionner et promet d’embaucher une « baby-sitter » pour superviser les transactions financières de son mari si elle redevient première ministre en 2025.
Les Norvégiens sous le choc
Pour les Norvégiens, c’est un choc. Dans le royaume scandinave, la confiance à l’égard des politiques est traditionnellement élevée. Mais « il y a une ligne très mince entre confiance et naïveté », remarque Kim Arne Hammerstad, auteur d’un livre intitulé Politiske skandaler (« Scandales politiques », Res Publica, 2020, non traduit). Le journaliste voit dans ces révélations en série le fruit d’enquêtes sérieuses, menées par les médias norvégiens, qui, ces dernières années, ont fait le choix du journalisme d’investigation.
Le grand déballage a commencé au milieu de l’été, touchant d’abord la majorité au pouvoir. Le 21 juillet, des journalistes d’E24 établissent qu’en janvier, le ministre de la recherche et de l’enseignement supérieur Ola Borten Moe, numéro deux du Parti du centre, a acheté pour 400 000 couronnes d’actions de la compagnie publique Kongsberg Gruppen, actionnaire à 25 % du producteur de munitions Nammo, une semaine avant que le gouvernement approuve un contrat de plusieurs milliards de couronnes avec Nammo. Le ministre remet sa démission. Il n’est pas le premier.
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