Escalade de la violence des gangs, impunité « généralisée », corruption « endémique »… La crise en Haïti s’est « encore aggravée » depuis un an, a alerté mercredi 27 septembre le secrétaire général de l’ONU, réclamant un « appui international solide ».
« La crise multiforme que traverse Haïti, marquée avant tout par la violence en bande organisée, s’est encore aggravée depuis la mise en place du régime de sanctions » en octobre 2022, qui ne vise pour l’instant qu’un chef de gang, écrit Antonio Guterres dans un document.
Ce rapport est publié alors que les membres du Conseil de sécurité négocient le mandat d’une force internationale réclamée depuis un an par Port-au-Prince pour appuyer la police dépassée par la violence des gangs. Il s’agit d’une mission non onusienne dont le Kenya doit prendre la tête.
Près de 2 800 meurtres en huit mois
Depuis un an, la violence des gangs, qui ont resserré leur emprise sur la capitale et au-delà, « est devenue encore plus intense et plus brutale », s’alarme Antonio Guterres, décrivant l’utilisation du viol comme arme de terreur, la présence de snipers sur les toits ou l’immolation par le feu de personnes vivantes, mais aussi l’émergence au printemps d’un mouvement d’autodéfense.
Au total, près de 2 800 meurtres ont été enregistrés entre octobre 2022 et juin 2023 ; près de quatre-vingts victimes étaient mineures, selon le rapport. Le nombre d’enlèvements contre rançons, probablement sous-évalué, a également augmenté : près de 1 500 cas ont été répertoriés depuis un an. Cette violence « est alimentée par le trafic d’armes et de munitions », principalement en provenance des Etats-Unis, et « par les flux financiers illicites », dénonce le secrétaire général des Nations unies.
Résultat, « les membres des bandes armées sont plus nombreux et mieux armés » que les quelque 14 000 policiers comptabilisés à la fin de juin 2023. Et « les bandes utilisent des armes de plus gros calibre et du matériel plus sophistiqué ». Face à cette situation, plus de 5 % des effectifs ont quitté la police au premier semestre.
La nécessité d’un « appui international solide »
Au-delà de la violence elle-même, le rapport déplore que « l’impunité demeure un problème généralisé ». Plusieurs affaires emblématiques, dont l’assassinat du dernier président Jovenel Moïse, il y a deux ans, ne progressent pas et la sécurité des juges est un problème. Et « la corruption demeure endémique », dans tous les secteurs de l’Etat, des pots-de-vin aux détournements de fonds, sans oublier le blanchiment d’argent.
Dans un système judiciaire engorgé, la situation dans les prisons s’est également détériorée, avec une superficie moyenne de 0,3 mètre carré pour chacun des 11 800 détenus (dont 9 950 sont en détention provisoire).
« La stabilisation des conditions de sécurité en Haïti passera par un appui international solide, non seulement à la police nationale pour rétablir la sécurité, mais aussi aux services pénitentiaires, au système judiciaire, aux contrôles douaniers et à la gestion des frontières », a insisté Antonio Guterres. Le tout, accompagné d’un financement « adéquat ».