Les élections au Pakistan se tiendront finalement en janvier 2024. D’ici là, le pays continuera d’être dirigé par un chef de gouvernement intérimaire, Anwar ul-Haq Kakar, représentant d’un parti du Baloutchistan. Depuis le 12 août, ce sénateur réputé proche de l’armée gère les affaires courantes, alors que le pays traverse une crise économique et sociale majeure.
La commission électorale a opté pour un calendrier qui convient au clan des Sharif, mais qui contredit la Constitution. Normalement, le scrutin aurait dû être convoqué dans les quatre-vingt-dix jours après la fin de la mandature, au plus tard en novembre. Officiellement, ce délai doit permettre de redécouper les circonscriptions sur la base du recensement de la population effectué en mai. Officieusement, il facilitera le retour de Nawaz Sharif après un exil de quatre ans à Londres. En novembre 2019, l’ancien premier ministre, condamné à une peine de sept ans d’emprisonnement dans une affaire de corruption, avait obtenu une permission de quitter temporairement le pays pour des raisons médicales. Il n’est jamais rentré.
Imran Khan neutralisé
Le fugitif de 73 ans est attendu le 21 octobre à Islamabad, et il compte diriger la campagne de son parti, Pakistan Muslim League-Nawaz, malgré l’interdiction à vie d’exercer une fonction publique qui le frappe. Son frère, Shehbaz Sharif, qui a succédé à Imran Khan en juin 2022, lui a préparé le terrain en faisant voter une loi limitant la durée d’inéligibilité des parlementaires à cinq ans.
De Londres, Nawaz Sharif a commencé à décocher ses flèches. « Aujourd’hui, le premier ministre pakistanais va de pays en pays pour quémander des fonds, alors que l’Inde a atteint la Lune et organise des réunions du G20. Pourquoi le Pakistan n’a-t-il pas pu réaliser les exploits de l’Inde ? Qui est responsable de cette situation ? », a-t-il demandé par liaison vidéo lors d’une réunion de son parti à Lahore, le 18 septembre. Il vise l’ancien chef des armées, le général Qamar Javed Bajwa, et son principal adversaire, Imran Khan, qui lui avait succédé en 2018.
Ce dernier a été neutralisé. Il croupit en prison depuis le 5 août et risque d’y rester longtemps. L’ancien premier ministre vient d’être mis en examen pour sédition, une infraction passible de la peine de mort, accusé d’avoir incité ses partisans à attaquer des bâtiments publics et militaires. Il était déjà sous le coup de plus de 150 procédures judiciaires allant de la corruption à l’incitation à la violence.
Dans sa geôle d’Attock, l’ancien champion de cricket n’a sans doute pas accès à Internet, mais le site d’investigation The Intercept vient d’appuyer ses allégations. Imran Khan a toujours clamé que son éviction du pouvoir en avril 2022, après le vote d’une motion de défiance du Parlement, était le fruit d’un complot de l’armée pakistanaise appuyé par les Etats-Unis. Durant des mois, il a repris ce refrain sur les estrades, mobilisant des foules gigantesques pour réclamer des élections anticipées.
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