Même cause, même effet : la très rapide hausse du taux d’intérêt par la Banque centrale européenne (BCE), de − 0,5 % à 4 % en un peu plus d’un an, provoque un coup de froid sur tous les marchés immobiliers européens, résidentiels comme commerciaux. Baisse des ventes de 25 % en Ile-de-France au deuxième trimestre, permis de construire en chute de 26 % en Allemagne en mai par rapport à 2022… Au premier trimestre, treize des quatorze pays européens couverts par Eurostat ont enregistré un déclin des transactions immobilières.
Jeudi 14 septembre, Christine Lagarde, la présidente de la Banque centrale européenne, s’excusait presque de cet effet, conséquence directe de la hausse des taux qu’elle a menée. « Le secteur immobilier, qu’il soit commercial ou résidentiel, (…) réagit fortement aux circonstances actuelles. (…) Nous en sommes conscients », reconnaît-elle. Simplement, continue-t-elle, son mandat de banquière centrale est de ramener l’inflation à 2 % (celle-ci est à 5,3 % actuellement en zone euro), pas de soutenir des pans spécifiques de l’économie.
Pour l’instant, aucun pays n’est véritablement en proie à un krach immobilier. Après des années de hausse impressionnante, il s’agit plutôt d’une correction, plus ou moins sérieuse : − 6 % aux Pays-Bas prévus en 2023, − 6,8 % au premier trimestre en Allemagne sur un an, − 0,8 % en France au deuxième trimestre par rapport au premier trimestre…
Les « banques de l’ombre »
Au-delà de l’impact financier pour les ménages, la question pour la BCE est de savoir si la chute des prix peut avoir un effet de contagion à l’ensemble du système financier. En 2008, la panique bancaire était venue de l’immobilier américain. Quinze ans plus tard, la situation n’a rien à voir, assure Luis de Guindos, le vice-président de la BCE, parce que les nombreuses régulations bancaires mises en place ont fortement renforcé la solidité des établissements financiers. Néanmoins, lui qui est chargé des questions de stabilité financière surveille de très près le sujet. « L’immobilier commercial avait commencé à baisser avant même le durcissement monétaire, à cause du Covid et du développement du télétravail », rappelle-t-il.
Or, une bonne partie du financement de l’immobilier commercial ne passe plus par les banques, limitées par les nouvelles réglementations, mais par les fonds d’investissement, surnommés « banques de l’ombre ». « Il y a des fonds mutuels immobiliers qui sont très exposés à ce secteur, et qu’on doit surveiller de près », poursuit M. de Guindos.
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