Un an après la révolution, le Sri Lanka assiste à une fuite massive de ses cerveaux

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Des étudiants réclament la libération de leurs camarades emprisonnés et célébrent l’anniversaire de la révolution pacifique ayant abouti au départ du président Gotabaya Rajapaksa, à Colombo, le 9 juillet 2023.

Les interminables files d’attente devant les stations-service de Colombo pour obtenir du carburant ou une bonbonne de gaz ont disparu du paysage, l’électricité fonctionne sans intermittence, le front de mer, épicentre de la contestation baptisée l’Aragalaya, (« lutte ») a retrouvé ses allures coquettes. Il flotte un air de normalité sur la capitale sri-lankaise, un an après une protestation citoyenne historique, qui a contraint le puissant clan des Rajapaksa à quitter le pouvoir. Le 13 juillet 2022, le président, Gotabaya Rajapaksa avait piteusement fui à Singapour. Les images des Sri-Lankais investissant joyeusement sa résidence, se baignant dans sa piscine, essayant son lit, font désormais partie du passé. La colère des Sri-Lankais qui avait éclaté après des mois de privations dus à une gestion calamiteuse et à un endettement abyssal, semble avoir été muselée. Ranil Wickremesinghe, le successeur de Gotabaya Rajapaksa à la présidence de la République, gouverne d’une main de fer, tuant dans l’œuf toute tentative de protestation en utilisant une loi draconienne sur la prévention du terrorisme.

Le chef de l’Etat s’attelle depuis un an à restaurer les finances publiques et à stabiliser l’économie, qui avait touché le fond lorsque l’île, totalement à court d’argent, a fait défaut sur sa dette extérieure (46 milliards de dollars, soit 41 milliards d’euros), le 12 avril 2022. Après plusieurs mois de négociations, le gouvernement a conclu, en mars, un plan de sauvetage avec le Fonds monétaire international (FMI) pour un prêt de 2,9 milliards de dollars, au prix de réformes fiscales drastiques exigées par l’institution monétaire : suppression des subventions sur l’eau, l’électricité, le fioul, relèvement de la TVA et de l’impôt sur les revenus, restrictions aux importations, mise en place d’un système de flottement pour la roupie, privatisation d’entreprises publiques, restructuration de la dette. Le FMI surveille de près la mise en œuvre des réformes. Les 2,9 milliards de dollars seront décaissés en neuf tranches sur quatre ans, et l’institution opérera une revue tous les six mois. La Banque centrale a cessé de faire tourner la planche à billets.

Toutes ces mesures d’austérité frappent de plein fouet la classe moyenne et les pauvres, déjà lourdement éprouvés par la crise sanitaire due au Covid-19 et par la crise économique. Le pouvoir d’achat des habitants a fondu sous l’effet de l’inflation – 70 % en 2022 – et du doublement des prix de l’électricité et de l’eau, ainsi que du niveau des impôts. L’appauvrissement du pays est général. Les Nations unies évaluent à 3,9 millions de personnes, soit 17 % de la population, le nombre de personnes souffrant d’insécurité alimentaire aiguë. Ce chiffre monte à 42 % parmi la population travaillant dans les plantations de thé. Environ 62 % des ménages sont contraints d’emprunter, de vendre leurs biens, ou de réduire les dépenses de santé et d’éducation. Pour l’opposition, le plan de sauvetage du FMI est un mauvais accord, signé sur le dos des pauvres.

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