En Thaïlande, le député réformiste vainqueur des élections menacé de suspension

0 Shares
0
0
0
Pita Limjaroenrat, à Bangkok, le 9 juillet 2023.

Une affaire épineuse qui plonge le royaume dans l’incertitude, à la veille du vote pour désigner le nouveau chef de gouvernement. La commission électorale thaïlandaise a recommandé, mercredi 12 juillet, la suspension du député réformiste Pita Limjaroenrat, vainqueur des législatives de mai et candidat pour devenir premier ministre, qui risque le procès devant la Cour constitutionnelle et la disqualification.

La commission électorale enquête depuis le début du mois de juin sur le candidat progressiste de 42 ans, à la tête du parti Move Forward, au sujet d’actions dans une chaîne de télévision qu’il possédait durant la campagne. Le code électoral thaïlandais interdit aux candidats de posséder des parts dans des médias d’information. Le parlementaire, qui risque la prison, la perte de son siège parlementaire et l’inéligibilité durant vingt ans, se défend de toute manœuvre illégale.

Le président de la commission électorale, Ittiporn Boonprakong, a confirmé mercredi auprès de l’Agence France-Presse que l’instance préconisait de suspendre Pita Limjaroenrat, dont le parti a été victorieux des élections législatives en mai. Plus tôt, la commission électorale a fait savoir dans un communiqué qu’elle transmettait les conclusions de son enquête à la Cour constitutionnelle. « La commission électorale (…) estime que le statut de Pita Limjaroenrat doit être considéré pour annulation et va soumettre la question à la Cour constitutionnelle pour une attention approfondie », a-t-elle annoncé. La Cour constitutionnelle doit désormais indiquer si elle accepte de se saisir de cette affaire.

Move Forward a dénoncé un « abus de pouvoir » de la commission électorale. La décision de l’instance, qui le soupçonne d’irrégularités, « sans l’informer des accusations et sans lui donner la possibilité de s’expliquer comme le prévoient les règles établies par la commission électorale, constitue un abus de pouvoir en vertu du code pénal », a déclaré le parti dans un communiqué.

Revers cinglant aux militaires au pouvoir

Deux mois après sa victoire, Pita Limjaroenrat n’est pas certain de devenir le prochain premier ministre, en raison de ses ennuis judiciaires et de l’opposition de sénateurs favorables à l’armée qui les a nommés.

Move Forward a infligé à la surprise générale un revers cinglant aux militaires au pouvoir depuis presque une décennie, avec un programme qui fait écho aux manifestations massives de 2020 pour plus de démocratie. En cas d’échec jeudi, de nouveaux tours seront organisés, avec l’hypothèse qu’un candidat plus consensuel émerge à la place du vainqueur des législatives.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés En Thaïlande, le parti Move Forward défie les conservateurs

La Thaïlande, qui a connu une douzaine de coups d’Etat réussis depuis la fin de la monarchie absolue, en 1932, subit régulièrement des crises politiques, entre interventions de l’armée et de la justice, et grandes manifestations populaires, parfois émaillées de violences. La Cour constitutionnelle est impliquée dans plusieurs de ces épisodes de tensions, comme en 2014, en destituant la première ministre, Yingluck Shinawatra. Deux semaines plus tard, l’armée prenait le pouvoir à la suite d’un coup d’Etat.

Les juges constitutionnels ont aussi dissous, en 2020, Future Forward, le parti d’opposition dont Move Forward a repris le flambeau. Cette décision controversée a poussé dans les rues des milliers de jeunes manifestants en faveur d’une réforme en profondeur de la monarchie.

Le Monde avec AFP

source

0 Shares
Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

You May Also Like