Mort de Boris Nemtsov : pour la Cour européenne des droits de l’homme, la Russie n’a pas enquêté « de manière adéquate »

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Un portrait de Boris Nemtsov brandi lors de la marche organisée en son hommage à Moscou, le 1ᵉʳ mars 2015.

L’enquête est vide. C’est en substance l’avis rendu, mardi 11 juillet, par la Cour européenne des droits de l’homme au sujet des investigations conduites par la Russie après la mort de l’opposant Boris Nemtsov, tué de plusieurs coups de feu le 27 février 2015 sur un pont près du Kremlin.

« La Cour constate en particulier que les autorités russes n’ont pas enquêté de manière adéquate sur l’identité des personnes qui avaient organisé et commandité l’assassinat ; qu’elles n’ont examiné ni les allégations selon lesquelles l’assassinat aurait pu être dicté par un mobile politique ni l’hypothèse d’une participation éventuelle de certains fonctionnaires de l’Etat ; et qu’elles n’ont pas déterminé quel était le motif de ceux qui auraient pu soudoyer les auteurs pour qu’ils assassinent M. Nemtsov », écrit la Cour dans son arrêt, en concluant que « globalement, l’enquête s’est caractérisée par un défaut d’effectivité ».

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) avait été saisie par Zhanna Borisovna Nemtsova, la fille de Boris Nemtsov. La Cour rappelle qu’une enquête pour meurtre a été ouverte dès le lendemain de la mort du célèbre opposant, conduisant à faire arrêter six suspects. L’un d’eux avait affirmé que l’assassinat était une réaction au soutien de M. Nemtsov à la publication de caricatures de Mahomet dans le journal satirique français Charlie Hebdo, avant de se rétracter en expliquant qu’il avait livré cette version sous la contrainte.

Questions non posées

En revanche, d’après la CEDH, plusieurs éléments de l’enquête « laissaient penser que des interactions avaient eu lieu [entre] des fonctionnaires du ministère de l’intérieur tchétchène et les suspects ». Le dirigeant tchétchène, Ramzan Kadyrov, proche allié de Vladimir Poutine, de même que les autorités fédérales russes étaient la cible récurrente des critiques de Boris Nemtsov, qui les accusait de corruption, note la cour en se fondant sur des proches de la victime cités par l’enquête russe. L’arrêt de la CEDH constate aussi qu’après la mort de M. Nemtsov, Ramzan Kadyrov fit l’éloge de l’un des suspects sur un réseau social, le décrivant comme « vrai patriote » et un « soldat courageux ».

« En octobre 2015, un certain R. Mukh fut inculpé en lien avec l’homicide car il était allégué que lui-même et d’“autres personnes non identifiées” avaient commandité le meurtre et offert une récompense de 15 millions de roubles russes [150 000 euros] aux auteurs présumés », écrit encore la CEDH, ajoutant qu’au moment du procès des suspects, « le juge (…) refusa que certaines questions fussent posées à des témoins au sujet des éventuelles connotations politiques du meurtre ». Quant à l’appel interjeté par Mme Nemtsova au terme du procès, demandant de requalifier les faits en assassinat politique, il a été rejeté en 2017.

Le Monde

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