
L’Azerbaïdjan assure que c’est provisoire. Les gardes-frontières du pays ont annoncé dans un communiqué, mardi 11 juillet, avoir suspendu « temporairement » la circulation dans le corridor de Latchine, le seul axe routier reliant l’Arménie et le Haut-Karabakh. Les gardes-frontières ont motivé cette mesure par « de multiples tentatives de contrebande » avec des véhicules appartenant à la branche arménienne de la Croix-Rouge par le biais de ce point de contrôle. Ils ajoutent qu’une enquête criminelle a été ouverte et que le poste-frontière sera fermé jusqu’à la fin des « mesures d’enquête nécessaires ».
Les gardes-frontières disent avoir entre autres saisi entre le 1er et le 5 juillet une dizaine de téléphones portables et des centaines de paquets de cigarettes lors de fouilles dans ces véhicules. Ils affirment que la Croix-Rouge arménienne n’a pas pris de mesures pour prévenir ces « actions illégales ».
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a soutenu mardi qu’aucune marchandise non autorisée n’avait été retrouvée dans ses véhicules sur le corridor de Latchine. « Nous regrettons toutefois que quatre chauffeurs qui avaient été mandatés aient tenté à notre insu de transporter des marchandises commerciales dans leurs propres véhicules, qui arboraient temporairement l’emblème du CICR. Ces personnes n’étaient pas membres du personnel du CICR et leurs contrats de service ont été immédiatement résiliés », a réagi l’organisation.
Depuis décembre 2022, l’Arménie accuse son voisin d’entraver l’approvisionnement vers la région sécessionniste et d’y créer une crise humanitaire en bloquant ce corridor. Initialement, Bakou avait affirmé que des militants écologistes azerbaïdjanais bloquaient la route pour dénoncer des mines illégales. En avril, l’Azerbaïdjan a ensuite annoncé avoir installé, pour des motifs « sécuritaires », ce point de contrôle donnant accès de l’Arménie au corridor de Latchine.
Deux guerres depuis la fin des années 1980
A la fin de juin, la branche arménienne de la Croix-Rouge a annoncé que les livraisons médicales aux hôpitaux du Haut-Karabakh ainsi que le transport des patients gravement malades avaient été suspendus via le corridor. L’annonce de la fermeture du poste-frontière risque de tendre les négociations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan qui doivent se dérouler en juillet sous la médiation de l’Union européenne.
La porte-parole du ministère des affaires étrangères arménien, Anna Badalian, a réclamé mardi des « efforts internationaux » pour rouvrir le corridor de Latchine. En juin, le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, avait dénoncé une forte dégradation de la situation humanitaire au Haut-Karabakh avec des livraisons de nourriture « presque à l’arrêt » et des patients empêchés d’aller se soigner en Arménie. Selon lui, les actions de Bakou illustraient une volonté de « nettoyage ethnique » dans la région sécessionniste.
Les deux pays se disputent le Haut-Karabakh depuis la fin des années 1980, entraînant deux guerres dont la dernière, en 2020, a vu la défaite des forces arméniennes et des gains de territoire importants pour l’Azerbaïdjan. Une partie de l’enclave, à majorité ethnique arménienne mais située sur le territoire internationalement reconnu de l’Azerbaïdjan, reste sous le contrôle de séparatistes arméniens, mais elle est désormais entourée de territoires tenus par Bakou. L’Arménie reproche en outre aux soldats de maintien de la paix russes, déployés dans le Haut-Karabakh depuis la fin de 2020, de faillir à leur obligation d’assurer la circulation sur le corridor de Latchine.