Le Livret A, « en apparence, c’est un mécanisme parfait, mais dans le détail, c’est plus compliqué », résume le patron d’une banque française. En confirmant, jeudi 13 juillet, une inflation de 4,5 % sur un an en France en juin, après 5,1 % en mai, l’Insee a ouvert la voie à une nouvelle hausse de la rémunération de « l’instrument d’épargne préféré des Français »… et validé une nouvelle fois ce constat.
Car s’il est pratiquement acquis que le taux du Livret A et du Livret de développement durable et solidaire (LDDS), fixé à 3 % depuis février, remontera à partir du 1er août, deux autres éléments semblent tout aussi certains : ce rendement restera inférieur à l’inflation et, surtout, sa hausse sera très loin de faire l’unanimité parmi les acteurs économiques concernés, qu’ils soient épargnants, banquiers, assureurs ou acteurs du logement social.
Depuis fin juin, les calculettes avaient déjà tourné, sans attendre le chiffre définitif de la hausse des prix : en appliquant strictement la formule de calcul en vigueur depuis janvier 2021, qui combine les chiffres de l’inflation hors tabac des six derniers mois et ceux du taux d’intérêt à court terme dans la zone euro dénommé euro short-term rate, le Livret A pourrait rapporter 4 %, voire 4,1 %, d’intérêts annuels à partir du 1er août, son plus haut niveau depuis 2008 et huit fois son niveau de début 2022.
« Circonstances exceptionnelles »
Mais cette application stricte est peu probable car le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, qui doit soumettre une recommandation au ministre de l’économie, Bruno Le Maire, peut arguer de « circonstances exceptionnelles » pour déroger à la règle, ce qu’il avait déjà fait en février en préconisant un taux de 3 % alors que la formule permettait d’aller jusqu’à 3,3 %.
Il a soigneusement préparé le terrain à cette option ces derniers jours, rappelant que « l’inflation a commencé à diminuer assez significativement », après avoir expliqué vouloir prendre en compte à la fois « la rémunération des épargnants et le bon financement du logement ».
La rémunération des épargnants est évidemment l’enjeu le plus immédiat, d’autant que les quelque 56 millions de Livrets A recensés en France ont vu leur collecte augmenter de 24,5 milliards d’euros sur les cinq premiers mois de l’année pour atteindre 399,9 milliards, auxquels s’ajoutent 142,2 milliards d’euros pour le LDDS.
Mais le relèvement d’août ne représentera au mieux, pour un livret d’un encours de 5 800 euros (la moyenne enregistrée en 2021 par la Banque de France), qu’une trentaine d’euros supplémentaires sur les six prochains mois, jusqu’au prochain ajustement. Pas de quoi compenser la perte de pouvoir d’achat liée à l’inflation, même si cette dernière est appelée à ralentir : dans ses dernières prévisions, la banque centrale la voit revenir à 2,4 % en moyenne en 2024.
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