Nouvelle-Calédonie : « Il faudra de toute façon un changement de la Constitution », confirme Emmanuel Macron

0 Shares
0
0
0
Emmanuel Macron, entouré du président du Sénat de Nouvelle-Calédonie, Victor Gogny, et du ministre de l’intérieur, Gérald Darmamin, s’adresse au Sénat local, à Nouméa, le 25 juillet 2023.

Emmanuel Macron a confirmé mardi 25 juillet qu’une réforme constitutionnelle propre à la Nouvelle-Calédonie aurait lieu « sur la base d’un consensus », comme prévu par l’accord de Nouméa de 1998, qui arrive à expiration. A l’issue des trois référendums d’autodétermination qui ont rejeté l’indépendance, le processus de décolonisation de la Nouvelle-Calédonie se poursuivra avec ce changement de statut dont « le degré » et « l’ambition » dépendront « du calendrier et de ce sur quoi on sait se mettre d’accord », a précisé le président de la République, lors d’un entretien sur les chaînes Nouvelle-Calédonie la 1ère et Caledonia et la radio RRB. « Il faudra de toute façon un changement de la Constitution et ce changement se tiendra », a déclaré le président.

Cette réforme « portera sur la Nouvelle-Calédonie, et je l’assume comme telle ». Et « après avoir parlé avec la présidente de l’Assemblée nationale et le président du Sénat, je sais aussi qu’ils partagent cette volonté que ce sujet puisse avoir son cadre constitutionnel propre », a ajouté le président, qui, par ailleurs, a ouvert une réflexion sur une réforme plus large de la Constitution.

Emmanuel Macron a également appelé les Calédoniens à « bâtir l’avenir », estimant que les trois référendums n’étaient « pas un point final », mais « un point virgule ». Et il faut désormais « construire la suite », a-t-il dit.

Le président du Sénat coutumier – cette institution consultative qui représente la coutume kanak –, Victor Gogny, a dit espérer que la venue de M. Macron favorise un « climat de confiance et de dialogue », alors que les négociations sur le futur statut institutionnel de l’archipel sont au point mort. « Nous formons le vœu que votre déplacement en Nouvelle-Calédonie marque véritablement le début d’un processus de réconciliation et de renfondation », a-t-il lancé dans la « grande case » du Sénat.

« La France doit réussir avec le peuple kanak et les citoyens calédoniens notre modèle de décolonisation »

Mais il a aussi mis en garde contre la volonté du ministre de l’intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, d’attendre « une ou deux générations » pour une éventuelle mise en œuvre du « droit à l’autodétermination » des Néo-Calédoniens, après les derniers référendums. « Cela peut être apparenté à un retour en arrière, et nous avons la conviction que la France doit vraiment construire et réussir avec le peuple kanak et les citoyens calédoniens notre modèle de décolonisation », a prévenu M. Gogny.

Face à cette attente, exprimée de manière posée mais ferme, M. Macron a reconnu que l’issue des référendums ouvrait une nouvelle page. Mais s’est toutefois aussi inscrit dans un temps relativement long, en jugeant que la nécessité de « bâtir » une « histoire commune », à travers un processus « vérité et réconciliation », était « une bonne méthode ». « Un travail de mémoire et d’histoire » qui est « lent, humble, exigeant », a-t-il glissé. « Le grand risque qui est le nôtre, c’est de faire du sur-place » et « de s’enfermer » dans « une identité figée et un débat institutionnel avec à nouveau des rendez-vous pour voter », a insisté M. Macron.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés En Nouvelle-Calédonie, la sortie de l’accord de Nouméa s’éternise

Les indépendantistes du Front de libération national kanak socialiste (FLNKS) contestent le résultat du dernier référendum de 2021, qu’ils avaient boycotté. Dès lors, les tractations sur le futur statut du territoire patinent et butent, notamment, sur la question épineuse du corps électoral, sur laquelle il est pourtant urgent de s’entendre pour aboutir à une révision institutionnelle à temps pour les élections provinciales de 2024.

Les accords de Nouméa, qui avaient engagé le processus de décolonisation du « Caillou », prévoient une réforme de son statut à l’issue des trois référendums. L’organisation politique mise en place en 1998 qui lui permet une très large autonomie, demeurera jusqu’à cette modification constitutionnelle. Il faut également supprimer ces accords qui ont été inscrits aux articles 76 et 77 de la Constitution à l’époque.

Emmanuel Macron assiste à une cérémonie de bienvenue avec des danseurs et des guerriers traditionnels au Sénat local de Nouméa, le 25 juillet 2023.

Un nouveau rendez-vous entre indépendantistes et non-indépendantistes à Paris en août

Dans l’immédiat, l’exécutif collégial est composé de 11 membres, élus à la proportionnelle par le Congrès. Institution atypique, elle a instauré une démocratie consensuelle en Nouvelle-Calédonie et non majoritaire. Droit à l’emploi, fiscalité, formation professionnelle, commerce extérieur, desserte maritime, droit du travail, sécurité civile, enseignement du second degré figurent parmi les compétences qu’exerce le gouvernement. L’Etat français exerce, de son côté, les compétences régaliennes : justice, défense, ordre public, monnaie et affaires étrangères.

Newsletter

« Politique »

Chaque semaine, « Le Monde » analyse pour vous les enjeux de l’actualité politique

S’inscrire

La question du corps électoral est également posée, pour lequel le président Macron a souhaité mardi « trouver le consensus, là aussi, entre les forces politiques pour un dégel ».

L’accord de Nouméa prévoyait qu’une durée minimale de résidence de dix ans était nécessaire pour voter aux élections provinciales afin d’éviter que l’arrivée de populations nouvelles fausse le rapport de force entre indépendantistes et non-indépendantistes. La réforme constitutionnelle de 2007 a encore durci les conditions d’accès à ce corps électoral, en instaurant une date limite d’arrivée sur le territoire. Depuis, le corps électoral est l’objet de controverse permanente dans l’archipel.

Or, de nouvelles élections provinciales doivent avoir lieu en 2024, d’où l’exigence des non-indépendantistes de rouvrir le corps électoral, puisqu’ils estiment que le processus de décolonisation qui avait conduit à cette exception au suffrage universel est clos. Les indépendantistes, qui refusaient jusque-là toute concession, ont récemment accepté d’ouvrir les négociations. « Je salue l’esprit de discussion et d’ouverture des forces politiques, qui sont en train d’avancer sur ce sujet », s’est félicité M. Macron mardi.

A ce stade, Gérald Darmanin n’a cependant pas réussi à réunir indépendentistes et non-indépendantistes autour d’une même table pour de véritables négociations tripartites. Il a fixé un nouveau rendez-vous à Paris à la fin d’août. Emmanuel Macron va-t-il débloquer l’impasse ? Il doit réunir mercredi tous les acteurs, même si une frange du FLNKS affirme vouloir boycotter la rencontre.

Le Monde avec AFP

source

0 Shares
Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

You May Also Like