Limiter la demande en énergie des plus gros consommateurs européens, un levier significatif dans la lutte contre le réchauffement

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A l’aéroport d’Orly, le 1er août 2020.

La transition énergétique peut-elle être juste ? Exige-t-elle davantage d’efforts de certains segments de la population ? Ces questions sont éminemment politiques, profondément clivantes et encore peu abordées dans le débat public. Une étude, publiée lundi 17 juillet dans la revue Nature Energy, apporte des éléments chiffrés à la discussion. Pour la première fois, des chercheurs d’universités britanniques ont quantifié les émissions de gaz à effet de serre qu’il serait possible d’économiser en plafonnant la demande des plus gros consommateurs.

« Dans la société, l’usage de l’énergie est réparti de façon très inégale, explique Milena Buchs, principale autrice et professeure à l’université de Leeds. Si nous voulons lutter contre le réchauffement, cela peut être une bonne idée de cibler en premier lieu ceux qui en utilisent le plus. Nous nous sommes aussi demandé si nous pouvions également augmenter la consommation des personnes en situation de précarité énergétique, et parvenir malgré tout à réduire les émissions. »

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) comme l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estiment que l’atteinte des objectifs climatiques nécessite d’agir sur la demande (par des changements d’usages et de comportements), en plus d’agir sur l’offre (remplacer les fossiles par des renouvelables, par exemple). « Cette étude aborde une question importante, réagit Massimo Tavoni, directeur de l’Institut européen d’économie et de l’environnement, qui n’a pas participé aux travaux. Compte tenu de la grande disparité de consommation d’énergie et de la nécessité d’une transition juste, il est logique de se concentrer sur les gros consommateurs. »

Le transport, secteur le plus inégalitaire

Pour réaliser leurs calculs, les chercheurs de Leeds et Manchester ont pris en compte l’ensemble des consommations énergétiques de près de 275 000 foyers dans 27 pays européens. Selon leurs estimations, plafonner la consommation des 20 % qui en utilisent le plus pourrait réduire les émissions du secteur résidentiel de 11,4 % et celles du transport de 16,8 %. Au total, cela entraînerait une diminution de près de 10 % des émissions liées au secteur de l’énergie. L’effet est particulièrement marqué pour le transport, le secteur le plus inégalitaire : la consommation du « top 10 » et « top 20 » représente, respectivement, 30 % et 47,5 % de la consommation totale, portée notamment par un recours important aux trajets en avion.

Les chercheurs se sont aussi intéressés au profil de ces « gros consommateurs ». Avoir un haut niveau de revenu et d’éducation accroît fortement la probabilité d’en faire partie, alors que le fait d’être âgé, de vivre en milieu urbain et avec d’autres personnes (ce qui crée des économies d’échelles) le réduit. « Le niveau de revenu est clairement la principale caractéristique, note Milena Buchs. Par ailleurs, beaucoup pensent que les personnes les plus diplômées consomment moins d’énergie, parce qu’elles sont mieux informées sur le réchauffement, mais ce n’est pas le cas. »

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