
Un simple extrait d’interview sur Fox News. Un moment parmi d’autres, qui dit la réalité paradoxale d’une campagne, celle de Ron DeSantis. Le gouverneur de Floride était interrogé, le 6 juillet, sur cette chaîne conservatrice qui l’avait jusqu’alors entouré de ses faveurs. « Je vous aime bien », commença le présentateur en préambule. Puis il questionna le candidat aux primaires républicaines sur sa difficulté à établir une connexion avec les électeurs. La réponse de Ron DeSantis ? La preuve par l’argent.
En six semaines, son équipe de campagne a levé vingt millions de dollars. Le comité d’action politique (super PAC) qui le soutient, appelé Never Back Down, en est à 130 millions de dollars (115 millions d’euros). « Personne n’a réussi à égaler ça dans l’histoire de la politique présidentielle moderne », s’est réjoui le candidat, avant d’expliquer qu’il était en train de construire son réseau de militants dans tous les Etats-clés. Si le doute était un pays, Ron DeSantis ne saurait pas le situer sur la carte.
Dans son entourage pourtant, les interrogations émergent. « C’est une bataille difficile », a lâché Steve Cortes, l’un de ses porte-parole. Cette campagne devait être une démonstration de professionnalisme et de moyens. Un blitz politique visant à renverser la domination de Donald Trump sur le Parti républicain. L’entrée en scène de Ron DeSantis fin mai – sous la forme peu solennelle d’une conversation confuse avec Elon Musk sur Twitter – était présentée par ses partisans comme le premier pas d’une conquête. Quelques semaines ont passé, et le constat s’impose : le gouverneur de Floride ne bénéficie d’aucune dynamique. Selon le site FiveThirtyEight, qui propose une agrégation des sondages nationaux, l’avance de Donald Trump s’est accrue. L’ancien président – qui a qualifié son rival, le 8 juillet, de « fils de pute (…) fortement surcoté » – a plus du double des intentions de vote dans les primaires républicaines, dépassant la barre des 50 %. DeSantis, lui, a chuté sous les 20 %, au point que le groupe Murdoch – qui possède Fox News, le tabloïd New York Post et le Wall Street Journal – semble prendre ses distances par rapport au candidat, selon la presse américaine.
Le contexte politique hors norme invite à la prudence. Les primaires débuteront dans l’Iowa le 15 janvier 2024. Encerclé par les menaces judiciaires, Donald Trump a beau dominer les sondages, il suscite des doutes profonds sur sa capacité à gagner la présidentielle, au-delà du cercle de ses fidèles. Déjà deux fois inculpé, en attendant une probable troisième mise en accusation début août en Géorgie, puis une possible quatrième dans l’enquête fédérale sur l’assaut du 6 janvier 2021 contre le Capitole, l’ancien président ne parle que de lui, de la persécution dont il s’estime victime. Mais les autres candidats n’en profitent pas. Ils s’enfoncent dans des sables mouvants. Ce phénomène est plus frappant encore pour Ron DeSantis, en raison de l’intérêt qu’il avait suscité après les élections de mi-mandat, en novembre 2022, et sa réélection triomphale en Floride. Il était alors donné au coude-à-coude avec Donald Trump dans les sondages, notamment dans des Etats-clés comme le New Hampshire.
Il vous reste 67.65% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.