Projet de loi sur la restauration de la nature : journée décisive au Parlement européen

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Manifestation en faveur du projet de loi sur la restauration de la nature, le 11 juillet 2023 à Strasbourg.

La bataille a été farouche. Le projet de loi sur la restauration de la nature, portée au niveau européen, a été adopté, mercredi 12 juillet, par le Parlement européen. Malgré l’opposition du Parti populaire européen (PPE, droite, majoritaire dans l’hémicycle), 336 députés européens ont voté pour, 300 ont voté contre et 13 se sont abstenus. Le texte a toutefois été adopté dans une version minimaliste par rapport à ce que la Commission avait proposé.

Un peu plus tôt, les eurodéputés avaient majoritairement rejeté la proposition du PPE, qui soutenait une motion de rejet en bloc du texte. Le vote avait été serré : 324 députés européens ont voté contre la motion prônant le rejet du projet de loi, tandis que 312 ont voté pour et 12 se sont abstenus.

Le projet de loi, texte phare du Pacte vert de l’Union européenne (UE), avait été proposé mi-2022 par Bruxelles et imposerait aux Etats membres des objectifs contraignants de restauration de terres et d’espaces marins abîmés par la pollution ou l’exploitation intensive, pour préserver la biodiversité, dans la lignée de l’accord de la COP15 à Montréal.

Comme pour d’autres textes du Pacte vert, les conservateurs disent s’inquiéter de l’impact pour l’agriculture, la pêche ou les énergies renouvelables. « Restaurer la nature ne doit pas signer l’arrêt de mort de toute production économique, industrielle, forestière et agricole en Europe », a martelé l’élue française Anne Sander (PPE), rapporteure du texte en commission agriculture. Elle fustige notamment l’objectif de « particularités topographiques à haute diversité » (haies, fossés, zones humides…) sur 10 % des surfaces agricoles d’ici à 2030.

Bruxelles « estime que geler purement et simplement 10 % de nos terres agricoles ne représente pas un danger pour notre sécurité alimentaire, critique-t-elle. Nous diminuerons peut-être nos émissions, mais il faudra importer notre nourriture des quatre coins du monde, où les standards de production sont bien éloignés des nôtres. » Des arguments repris par la puissante organisation agricole Copa-Cogeca, qui manifestait son opposition mardi devant le Parlement au nom d’une approche productiviste.

Dans une manifestation concurrente, une centaine de militants pour le climat emmenés par Greta Thunberg ont au contraire défendu le projet. « Pour atténuer crise climatique et perte de biodiversité, nous devons restaurer davantage la nature. La science l’a prouvé », a déclaré la jeune militante suédoise, espérant un vote « le plus large possible » en faveur du texte.

« Un vrai problème »

A l’approche du scrutin européen de juin 2024, la stratégie du PPE est taxée d’« électoraliste » par les partisans du texte, qui dénoncent « des contre-vérités » et s’alarment d’un rapprochement avec l’extrême droite (ID) et les eurosceptiques (ECR). « Historiquement, la droite avait la conservation de la nature dans sa philosophie. Aujourd’hui, elle préfère s’aligner sur l’extrême droite et les lobbies, c’est une rupture », a déploré l’écologiste Yannick Jadot.

« Les fameux “10 % des terres agricoles gelées”, cela n’a tout simplement jamais existé », abonde Pascal Canfin (Renew, centristes), président de la commission environnement. Il s’agit d’une cible indicative à l’échelle de l’UE qu’on peut atteindre en plantant des arbres fruitiers ou via des rotations de cultures, a-t-il rappelé. Sans compter que cela pourrait renforcer les rendements agricoles (moindre érosion des sols, pollinisation accrue, retour d’oiseaux s’attaquant aux parasites…). « On est très en colère contre l’impossibilité d’avoir un débat rationnel. D’habitude, ce genre d’argument est porté par l’extrême droite, jamais le PPE. On a un vrai problème », s’alarme cet ancien ministre français.

Pourtant, avec plus de 80 % des habitats naturels européens déjà dégradés, « il s’agit du strict minimum, qui n’est même pas à la hauteur des enjeux pour être dans les clous de l’accord de Paris » sur le climat, insiste Manon Aubry (GUE/NGL, gauche).

Le Monde avec AFP

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